Le droit à se faire entendre ?

Au risque de passer pour le vieux réac avec 30 ans de retard, il y a toujours des propos qui me font réfléchir.
Attention, ce billet s’annonce plutôt chiant.

Ainsi, j’entendais à la radio une jeune femme justifier son occupation des voies SNCF en des mots qui donnaient à peu près ceci : « cela fait déjà 3 mois que l’on manifeste et que l’on fait des grèves, le gouvernement n’a pas reculé, il faut bien qu’on se fasse entendre ».

Sur le fond de sa revendication, le pire, c’est que je suis absolument d’accord avec elle. Cependant, existe-t-il vraiment un droit à se faire entendre ? Ou plus précisément, un droit à être écouté d’une part, et avoir gain de cause d’autre part ?

A priori, l’un fondement des fondements de la démocratie c’est de pouvoir s’exprimer, le droit à crier donc, et malgré un certain nombre de pratiques autoritaires de la gouvernance actuelle, il n’a pour le moment absolument pas été remis en cause. Les manifestations sont autorisées, dans la très grande majorité des cas, elles se passent bien, et s’il y a toujours maintes forces policières, je crois qu’on n’a jamais entendu les organisateurs se plaindre d’une quelconque intimidation par celles-ci.

Mais donc, si à force de manifestations rien n’y fait, rien ne change, a-t-on légitimité à passer à la vitesse supérieure ? Si une cause ne mobilise pas assez de gens pour que des manifestations monstres, qui ont su faire reculer les gouvernements dans le passé, se crée, la cause est-elle légitime ? Peut-on en son nom bloquer des centaines de passager (attention, rien à voir avec les grèves SNCF qui se contentent de ne pas travailler, sans empêcher désormais les non-grévistes de le faire !)

D’un côté, un grand nombre d’avancées de notre société se sont faites grâce à des transgresseurs, c’est à dire précisément des gens qui ont été plus loin que la simple grêve/manifestation. Mais 1-il s’agit tout de même plutôt d’avancées sociales (le manifeste des 343 salopes menant à la loi sur l’avortement par exemple) 2-on entend aujourd’hui des appels à la désobéissance pour tout et n’importe quoi.

D’un autre côté, si une partie de la population est favorable à une mesure, et une autre défavorable, les deux parties vont-elles alors venir s’affronter pour voir laquelle bloque le plus de train, brise le plus de poubelles, provoque le plus d’opérations escargot ? Non, car ce n’est pas ainsi qu’on a conçu la démocratie ! Si une cause ne réunit que peu de gens, c’est qu’elle n’est pas populaire et le gouvernement peut continuer sa réforme de manière légitime (au delà de la légitimité d’avoir une assemblée élue au suffrage universelle qui votera la loi).Mais de plus en plus, qui est prêt à se mobiliser pour une cause qui ne le touche pas directement ? Qui va sacrifier ses courses du samedi pour aller manifester ? Moi le premier, je me déclare pas prêt du tout à aller manifester pour soutenir cette bonne dame avec qui j’étais pourtant d’accord.

Autant dire que je suis complètement perdu, j’entends bien les arguments des deux côtés, et ils me semblent tous importants. Je ne sais quoi penser. Au secouuuuuuuuuuuurs !

(Comme promis, c’était assez chiant, je vais arrêter de parler politique)

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3 Responses to Le droit à se faire entendre ?

  1. Mél dit :

    Et que faire pour que des gens, fatigués de faire grève à force de ne pas parvenir à se faire entendre, se mobilisent pour une cause qu’ils croient pourtant juste et défendable ?

  2. h dit :

    Je crains que la société actuelle, dans une direction consumériste et individualiste, ne favorise pas cette direction …. 🙁

  3. Oli dit :

    Tiens, y’a des sujets de discussion qui te restent longtemps à l’esprit 😉